Appelle-moi Sophie
J'ai toujours eu une attirance pour l'Asie. En 2009, pour la première fois, je prenais l'avion et partais à la découverte de ce territoire magnétique. J'allais rendre visite à Violette, installée à Shanghai. Puis j'irais à Hong Kong, voir mon amie Bérangère. Entre les deux mégalopoles, j'ai fait une halte à Pékin. J'ai été encore plus fascinée. J'ai un jour décidé de participer à une excursion proposée par mon hôtel, afin de visiter la Grande Muraille. J'étais la seule occidentale du bus. Arrivé sur le site à visiter, un premier couple de Chinois me demanda s'il pouvait se prendre en photo avec moi. J'acquiescais poliment. Me voilà tout sourire devant la Muraille, immortalisée avec des Chinois que je ne connaissais pas. Mais je n'étais pas au bout de ma peine, bientôt deux, puis trois, puis quatre Chinois étaient venus formuler auprès de moi la même demande. J'étais un peu gênée. Mais je disais oui. Je crois que j'ai pris des photos avec tous les Asiatiques du bus ! J'ai compris qu'ils n'avaient jamais vu de fille aux cheveux frisés, au teint mat.
Quelques années plus tôt, à Marseille, j'avais déjà noué contact avec des Chinois, ou plutôt des Chinoises. Notre école de journalisme, l'EJCM, accueillait de nombreux étudiants venus de l'Empire du milieu. Dans la salle informatique, les pauvres se débattaient avec le mode d'emploi pour ouvrir leur session informatique. J'avais prêté main forte à deux Asiatiques : Chue et Ke, prononcez "Chueux et Keux". Chue était très reconnaissante. Je lui parlais souvent. On avait sympathisé. En fin d'année, afin de me remercier, elle nous avait invitées, Elisa et moi, dans sa petite chambre d'étudiante pour un repas traditionnel. Après une séance photo interminable où elle nous avait montré les clichés pris en France durant l'année -plus de 500 photos de Versailles, Paris, les châteaux de la Loire-, le repas pouvait enfin commencer. Chue avait cuisiné du boeuf. Un mets excellent. La viande était coupée en fines lamelles. Je lui avais demandé comment elle avait réussi une telle prouesse. Elle était alors sortie de sa cuisine avec deux énormes couteaux à la main. Des outils impressionnants. Je lui avais demandé si elle avait pu passer la douane sans problème : Chue avait répondu qu'elle avait franchi les contrôles sans aucune difficulté.
La soirée était agréable. Arriva enfin le dessert. Chue nous apporta un bol avec un thé et au milieu, une méduse semblait flotter. Notre hôte nous invita à manger cette "soupe sucrée" et à rajouter du sucre si besoin. Je gouttais la soupe non sans une certaine appréhension. Affreuse sensation. Je saisis le sucre pour faire passer le goût. Rien n'y faisait. Je n'appréciais pas du tout ce dessert. Par politesse, je m'étais forcée à en manger le plus possible. A mes côtés, Elisa me lançait des regards disant "Au secours", tandis qu'elle vidait le paquet de sucre dans sa soupe. Sur le chemin du retour, on avait beaucoup ri. Mais je crois que je n'ai pas autant ri que lors de ma première rencontre avec Chue. Je me suis présentée. Elle aussi. L'étudiante a alors prononcé cette phrase magique : "Je suis Chue. Mais appelle-moi Sophie ! ". Cette Sophie-Chue m' a accompagnée toute une année durant. Malheureusement, elle a mystérieusement disparu une fois rentrée en Chine. Elle ne répondait plus à mes mails. C'est dommage, je l'appréciais vraiment cette Sophie et ses couteaux de mafieux chinois.
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