Nounou


Mon fils aura 7 ans dans quelques jours. Il entrera en classe de CE1 en septembre. Déjà. C’est un lieu commun, mais le temps passe trop vite. Je le revois à sa naissance, puis âgé de quelques mois, ses premiers pas mal assurés, et enfin ses premiers mots. Autre étape marquante, lorsque nous l’avons confié à une assistante maternelle. Cette dernière était notre voisine. Nous n’avions qu’à faire le tour du pâté de maison pour aller chez elle. Dès notre premier entretien, Nounou a fait l’unanimité. Profonde gentillesse, douceur naturelle, maison bien entretenue, mon mari et moi avons tout de suite eu confiance. Nounou était parfaite. Eliott allait chez elle, retrouvait d’autres petits. Nounou écrivait chaque jour sur un cahier de liaison les activités menées avec notre progéniture. Elle débordait d’idées pour occuper les chères têtes blondes. Nous, parents, étions ravis. Eliott se sentait visiblement bien chez elle. 


Très vite, un petit détail a attiré mon attention. Elle ne disait jamais « je ». Elle préférait commencer ses phrases par : « Nounou », suivi d’un verbe conjugué. Elle parlait d’elle à la troisième personne du singulier. Un côté Alain Delon qui me faisait sourire. Nounou se mettait à hauteur d’enfant et ne dérogeait jamais à cette règle. Je l’imaginais alors s’adresser à ses enfants, en commençant ses phrases par le même modèle, ou pire encore, parler à son mari, dans l’intimité, et lui lancer un « Viens voir Nounou! »…


Mais ce n’est pas tout. J’allais vite m’apercevoir qu’elle avait un autre tic de langage caractéristique. Elle n’utilisait jamais le subjonctif. Toutes ses phrases étaient à l’indicatif. Jamais elle n’utilisait ce mode du virtuel. Exemple : «  Nounou pense qu’il faut qu’Eliott vient demain » ou encore « C’est vraiment important qu’Eliott est propre ». Ces fautes de conjugaison me faisaient saigner les oreilles. Je me demandais pourquoi Nounou, qui n’avait pas l’air d’être issue d’un milieu difficile, qui était allée à l’école, commettait systématiquement cette erreur. Je voulais comprendre. Et puis finalement je m’y suis habituée. Vers la fin de sa mission, je remarquais à peine cette faute de français. Elle aimait tant notre fils et Eliott le lui rendait tellement bien que cette grossière erreur de conjugaison ne m’interpellait même plus. Finalement ce n’était pas là le plus important. Il faut que je vous « dis »: Nounou était vraiment une perle rare.


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